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Le Pape Alexandre VI par J. CHANTREL

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 Le Pape Alexandre VI par J.  CHANTREL Empty Le Pape Alexandre VI par J. CHANTREL

Message  Diane Lun 25 Oct 2010 - 17:59

Avant de passer à la vie d'Alexandre VI, voici la préface du Tome I ainsi que les lettres d'approbations des pages V à VIII

HISTOIRE POPULAIRE DES PAPES
LES PAPES D E S TEMPS MODERNES
PAR J. CHANTREL
TROISIÈME ÉDITION
TOME PREMIER
PARIS C. DILLET, LIBRAIRE-ÉDITEUR
15, RUE DE SÈVRES, 15
1865.


Préface du tome Ier


La papauté est attaquée de nos jours avec un acharnement inouï. L'impiété, qui sent que là se trouve la force de résistance de l'Église catholique, use contre cette institution divine de toutes les armes que peuvent fournir la mauvaise foi ou une fausse érudition. Les Papes sont représentés comme incapables; on les accuse d'être les ennemis de la raison humaine, les ennemis de la liberté, les ennemis de tous les progrès, les ennemis enfin de la civilisation, qui trouve en eux ses plus grands obstacles, et afin d'avilir dans l'opinion ces Pontifes, dont l'existence et le pouvoir excitent tant de rage, on va, comme le faisait un journal malheureusement trop répandu, on va jusqu'à dire que l'histoire des Papes est une des plus honteuses histoires qu'on puisse lire, une histoire dont les pages feraient rougir les lecteurs les plus éhontés et amèneraient en police correctionnelle celui qui oserait les reproduire.


C'est ainsi qu'on traîne dans la boue le Vicaire et le représentant de Notre-Seigneur Jésus-Christ. De pareilles accusations ne devaient pas rester sans réponse, de telles calomnies devaient être détruites, de telles attaques devaient être repoussées, et puisque c'est le peuple que Ton cherche à séduire, puisque c'est à lui qu'on s'adresse pour lui faire voir dans la papauté le plus redoutable ennemi des classes populaires, des petits et des pauvres, c'est au peuple qu'il faut faire parvenir la vérité. Voilà pourquoi nous avons entrepris d'écrire une Histoire populaire des Papes.

L'accueil qui a été fait à notre œuvre nous dispense d'en dire davantage. Une édition italienne publiée sous les auspices de Monseigneur de Modène, deux éditions presque épuisées en France, nous font penser que notre travail répondait à un besoin du temps. C'est pourquoi nous nous sommes décidé à publier une troisième édition dans un plus grand format, et nous avons apporté à cette édition de nouvelles améliorations dont nous avons l'espoir qu'on nous saura gré.


Il ne nous reste qu'à remercier le public de son bienveillant accueil, et à citer quelques unes des hautes approbations qui nous ont encouragé.


A suivre...
Diane
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Message  Eric Lun 25 Oct 2010 - 20:19

Merci, chère Diane
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Message  Diane Mer 27 Oct 2010 - 16:45

Suite de la préface du Tome I ainsi que les lettres d'approbations des pages V à VIII !



MONSIEUR,

Je ne puis lire en entier, a cause rie mes nombreuses occupations, l'ouvrage que vous donnez au public sous le titre d'Histoire populaire des Papes. Ce que j'en connais me suffit pour juger de l'esprit qui vous a inspiré celte grande entreprise et du bien qu'elle est destinée à produire.

L'histoire des Papes, qui est celle de l'Église, a été entièrement dénaturée par les hérétiques avec une intention hostile et, plus d'une fois, altérée par des écrivains catholiques, sous l'influence d'opinions particulières peu favorables à l'autorité des Souverains-Pontifes.

Comme les historiens assez souvent se copient les uns les autres, les erreurs historiques et les injustes appréciations se perpétuent ainsi par tradition, et unissent par substituer à la vérité de l'histoire les préjugés les plus faux et les plus dangereux.

Dans ces derniers temps, les écrivains consciencieux et de grande valeur, tels que les MuzzarelH, les de Maistre, les Hurler, les Ranke, les Voigt, les Audin, etc., etc., ont corrigé bien des pages de notre histoire religieuse.

Mais, outre que ces auteurs n'ont pas fait un travail général et d'ensemble, leurs écrits ne sont point accessibles au plus grand nombre des lecteurs.

Vous avez donc rendu, Monsieur, un véritable service au peuple chrétien en lui présentant une histoire vraie, sincère,
écrite sans passion, où le lecteur, en s'instruisant des faits, peut en môme temps affermir sa foi et édifier sa piété.

Je donne bien volontiers mon approbation à votre ouvrage pour le clergé et les fidèles de mon diocèse.

Agréez, Monsieur, l'assurance de mes sentiments distingués et affectueux.

+.J. HIP.

Archevêque de Tours.
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Message  Diane Jeu 28 Oct 2010 - 16:16

Mon cher monsieur Chantrel,

Vous avez bien voulu m'envoyer les cinq premiers volumes de votre Histoire populaire des Papes. Je vous en remercie.

C'est du fond du cœur que je bénis une entreprise si catholique, si opportune dans les circonstances où nous sommes, si digne de votre cœur chrétien et si éminemment utile; car, hélas ! l'histoire de l'Église et de ses pontifes est trop ignorée, mêmes des personnes qui ont d'ailleurs quelque instruction. En éditant une Histoire populaire des Papes, vous rendez un grand service à la religion. Puisse votre ouvrage se répandre dans les maisons d'éducation et se trouver entre les mains de tous ceux qui aiment la vérité et la recherchent avec droiture d'âme !

Adieu, je vous renouvelle l'assurance de mes sentiments bien affectueux.

+ Jos. ARM.

Êvêque de Beauvais, Noyon et Sentis.
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Message  Diane Ven 29 Oct 2010 - 15:48

Cher Monsieur,

A l'occasion de la publication du dix-septième volume de votre Histoire populaire des Papes, où vous montrez si bien que la plupart des accusations dressées contre la mémoire du pape Alexandre VI ne sont que des calomnies et des préjugés sans fondement historique, permettez-moi de vous féliciter de votre catholique entreprise, qui touche à sa fin et qui a déjà fait tant de bien. Réhabiliter les Papes, les chefs de l'Église de Dieu sur terre, les pères de l'humanité régénérée, calomniés par l'hérésie et l'impiété, méconnus et abandonnés, ou du moins à peine défendus par une foule d'écrivains trop peu catholiques, quelle grande et sainte pensée ! Dieu vous en récompensera largement; s'il a promis le royaume du ciel aux moindres œuvres de charité faites pour son amour au moindre de ses enfants, que ne donnera-t-il pas aux courageux défenseurs des droits sacrés de l'honneur de ses Vicaires, qui sont les premiers d'entre tous les chrétiens, les fils aînés de sa famille, plus comblés que tous les autres des dons de sa grâce souveraine?

Je prie Noire-Seigneur de bénir vos travaux passés, présents et futurs, et de faire porter a tous ces petits livres le fruit que nous en espérons tous.

Tout à vous et bien cordialement,

L. D. SÉGUR, Chanoine-Évêque de Saint-Denis.
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Message  Diane Sam 30 Oct 2010 - 16:57

LE PAPE ALEXANDRE VI



Nous avons eu plus d'une fois occasion, en écrivant l'Histoire des Papes, de remarquer et de prouver combien la calomnie s'est attachée à ternir la réputation de ces Pontifes à qui l'Europe doit sa civilisation et sa supériorité. Nous voici arrivé à l'histoire d'un Pape sur lequel tant d'accusations ont été accumulées, et par la plupart des historiens, et par des historiens d'ailleurs catholiques et amis de la Papauté, qu'il doit paraître non-seulement hardi, mais audacieux de tenter de réhabiliter sa mémoire. Prononcer le nom d'Alexandre VI, c'est rappeler une série de crimes et d'infamies sur lesquels il semble que le parti le plus sage, pour un écrivain catholique, est de garder un silence prudent. Chercher à justifier l'infâme Borgia, n'est-ce pas entreprendre une œuvre aussi coupable qu'inutile? Dites, si vous le voulez, nous criera-t-on, que les crimes du Pape Alexandre VI ne retombent ni sur l'Église ni sur la Papauté, dites que les vices de l'homme privé n'altèrent pas le caractère sacré du Pontife, dites enfin, comme on l'a fait plus d'une fois, que la divinité des promesses faites à l'Église se trouve précisément confirmée par ce miracle, car c'est un miracle qu'elle ait pu résister à tant de honte et de perversité ; mais n'essayez pas de réhabiliter un nom à jamais flétri et trop justement flétri.


Ces conseils ne sauraient nous arrêter. Avant tout, c'est la vérité que nous aimons, c'est la vérité que nous voulons défendre, et nous ne devons nous laisser détourner de notre but ni par les préjugés ni par l'erreur. Nous avons commencé par juger le pape Alexandre VI comme tout le monde. Laissant aux ennemis de l'Église catholique la joie que leur causait cette tache hideuse imprimée sur la Papauté, nous gémissions sur le scandale, mais nous nous disions que Jésus-Christ Notre-Seigneur a prédit les scandales, et qu'il en a même indiqué la nécessité.

1 Notre histoire du Pape Alexandre VI a été accueillie avec plus de faveur que nous n'aurions osé l'espérer: nous attribuons ce succès à la force de la vérité, que nous nous sommes efforcé de présenter avec la plus entière bonne foi. Le témoignage le plus précieux qui nous soit arrivé à ce sujet, a été fourni par les ennemis mêmes de l'Église et de la Papauté. Ils nous attendaient, d'Alexandre VI. Ce fait nous paraît d'une grande valeur. Les accusateurs n'abandonnent pas l'accusation, mais ils ne répondent rien à la défense; ils persistent à demander une condamnation, mais ils ne peuvent prouver la véracité de leurs témoins à charge.

Nous avouons que nous n'avions pas compté sur un tel résultat; il nous a prouvé une fois de plus que les ennemis de l'Église ne sont hardis qu'à cause de notre timidité, que leurs affirmations ne procèdent d'aucune conviction sérieuse, et que, en allant droit à eux, en examinant de près leurs assertions, en pesant leur science à sa juste valeur, on est assuré de les faire reculer. L'Église ne craint pas la vérité, il suffît que la vérité brille pour qu'elle soit justifiée disaient-ils, au pontificat d'Alexandre VI, et ils nous promettaient pour ce moment de péremptoires réfutations. Quand notre livre parut, ils gardèrent un silence complet; un peu plus tard, ils lancèrent quelques plaisanteries; nous n'avons vu aucune réfutation, nous attendons encore, depuis trois ans, qu'on réponde aux arguments que nous avons présentés en faveur

HISTOIRE POPULAIRE DES PAPES.



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TROISIÈME ÉDITION
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1866.. pages 125-126-127

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Message  Diane Dim 31 Oct 2010 - 15:39


Plus tard, à l'aide de la réflexion et de sérieuses lectures, en voyant disparaître devant une étude plus approfondie la plupart des scandales dont on s'est plu à remplir l'histoire de la Papauté, en voyant la mémoire des Souverains-Pontifes les plus calomniés glorieusement réhabilitée par des historiens protestants, nous nous sommes demandé s'il était bien possible que le quinzième siècle eût supporté pendant onze ans un Pontife aussi dépravé, aussi odieusement infâme qu'Alexandre Vi, si Alexandre VI eût été en effet tel qu'on le dépeint habituellement. Le doute est venu, et après le doute, la conviction que le mal avait été au moins fort exagéré. Voltaire lui-même, qui ne ménage pas Alexandre VI, justifiait nos doutes, en reprochant à Guichardin d'avoir « trompé l'Europe » sur la mort d'Alexandre VI, en particulier, et « d'avoir trop cru sa haine. »

Une fois le doute éveillé dans notre esprit, il fallait chercher la solution de ce problème historique. Nous l'avons fait, et nous avons vu un historien protestant, Roscoé, commencer la réhabilitation en rectifiant un grand nombre d'erreurs, en repoussant un grand nombre de calomnies ; puis, remontant aux sources, nous avons reconnu que toutes les accusations venaient d'écrivains notoirement ennemis d'Alexandre VI, que plusieurs de ces accusations se contredisaient entre elles. Allant plus loin encore, et parcourant le fameux Diarium de Burchard, si souvent appelé en témoignage contre Alexandre VI, nous avons reconnu qu'il faisait tomber la plupart des calomnies.

Enfin, à côté[début de page effacée] (...)encore hésitants, encore disposés à prouver les circonstances atténuantes, nous en rencontrâmes de plus hardis, comme M. Audin, dans sa belle Histoire de Léon X, comme M. l'abbé Jorry, dans une Histoire spéciale d'Alexandre VI, comme le savant abbé Rohrbacher, dans son Histoire de l'Église, et plusieurs autres qui ne craignaient pas de trouver Alexandre VI irréprochable dans son Pontificat, et à qui il ne restait plus de doutes que sur le fils d'Alexandre VI, le fameux César Borgia
.


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1866.. pages 127 et 128

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Message  Diane Lun 1 Nov 2010 - 19:58

Est-ce assez? Ne peut-on justifier Alexandre VI qu'en accusant César Borgia et en ne laissant au Pape que le reproche d'une trop grande faiblesse et d'un déplorable aveuglement? Peut-être aurions-nous craint de nous avancer plus loin, si nous nous étions vu seul, mais un excellent article de la Revue de Dublin (N° XC, janvier 1859) nous a montré que l'histoire est en droit de réclamer davantage.

Une brochure récente, écrite par un ennemi qui s'est efforcé cependant d'être juste, a achevé de nous convaincre : ce n'était sans doute pas le but que se proposait l'auteur, M. La Rochelle, l'un des collaborateurs du Siècle, lorsqu'il écrivait sa brochure sur les Droits du Saint-Siège, Alexandre VI et César Borgia; mais en voyant un ennemi des Papes et de leur souveraineté temporelle amené à reconnaître que César Borgia s'était fait aimer des peuples qu'il avait délivrés de leurs tyrans, et avouer franchement que beaucoup des crimes reprochés à Alexandre VI n'ont jamais été commis, nous nous sommes senti rassuré.

Aujourd'hui, notre conviction est formée : nous croyons qu'il est désormais impossible de représenter Alexandre VI comme un monstre et un Néron coiffé de la tiare, qu'il est possible d'établir qu'il fut un digne Pontife et un grand roi, et non un débauché, un perfide et un assassin, enfin que les catholiques n'ont plus à rougir en entendant prononcer son nom. Et comme ce nom parait de plus en plus pur à mesure que l'histoire est mieux connue, qu'on pèse plus attentivement et plus impartialement les témoignages, qu'on étudie plus soigneusement les circonstances au milieu desquelles agit Alexandre VI, nous ne désespérons pas de voir un jour les plus graves historiens répéter, d'accord avec la Revue de Dublin, qu'Alexandre VI a été calomnié en tout, comme l'avaient été avant lui saint Grégoire VII, Innocent III et Boniface VIII, avec cette seule différence qu'il l'a été avec plus d'ensemble et de succès.


À suivre...



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1866.. pages 128 et 129

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Message  ROBERT. Lun 1 Nov 2010 - 21:51

.

Merci Diane. On ne publira jamais assez d'ouvrages, tel celui-ci, qui lavent des calomnies dont tous les

Papes Alexandre VI, Saint Grégoire VII, Innocent III et Boniface VIII avaient été chargées...
.
ROBERT.
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Message  Diane Mar 2 Nov 2010 - 17:13

On revient souvent, dans ce temps, sur le pontificat d'Alexandre VI. Les ennemis de la Papauté, qui veulent en détruire la souveraineté temporelle afin d'arriver plus sûrement à ébranler son autorité spirituelle, affectent de dire que la royauté des Papes ne remonte réellement qu'à ce Pontife, et que c'est là une bien triste origine pour un pouvoir que les catholiques prétendent être sacré. Les lecteurs de notre Histoire des Papes savent qu'elle est la fausseté de cette donnée historique. Ils ont vu la souveraineté temporelle des Papes, en germe dans les temps apostoliques, se montrer déjà sous les premiers empereurs chrétiens, se développer du temps des empereurs iconoclastes, pour s'établir complètement au huitième siècle par une croissance lente et sûre, qui est la marque des œuvres divines, ou de ce que les hommes qui rejettent l'idée de Providence appellent la force des choses.

Cette royauté, brillante au huitième et au neuvième siècle, s'obscurcit, on sait comment, au dixième siècle et pendant une partie du onzième; mais jamais la prescription ne prévalut contre elle. Elle grandit sons le Pontificat de saint Grégoire VII, qui reçut la donation de la comtesse Mathilde ; elle fut reconnue par les empereurs mêmes qui la combattaient; Innocent III la restaura; elle ne succomba pas sous les Papes d'Avignon, qui trouvèrent dans le cardinal Albornoz un bras si ferme. Affaiblie, non détruite pendant le grand schisme, elle reparut aussitôt ; Alexandre VI ne fit que préparer les voies à son complet affermissement, en détruisant les petites tyrannies qui opprimaient les États de l'Église; Jules II acheva l'œuvre, en abattant le destructeur même de ces tyrans, César Borgia, qui prétendait à son tour à la souveraineté, et dès lors fut consolidée cette monarchie qui donna trois siècles de tranquillité et de bonheur aux Romains.

Ainsi la royauté pontificale ne date pas d'Alexandre VI. Elle en daterait, que ses ennemis n'en seraient pas plus avancés, car elle n'en aurait pas moins pour elle une possession de près de quatre siècles, une possession reconnue par des traités, admise par l'Europe; enfin elle n'aurait pas une origine si honteuse, puisqu'il est faux qu'Alexandre VI ait été un indigne Pontife.

Ce sont toutefois ces attaques récentes qui nous ont engagé à donner plus de développement à l'histoire du pontificat d'Alexandre VI, si bien complété par celui de Jules II.

Nous nous sommes fait un devoir de lire les attaques avec autant de soin que les témoignages favorables. Les écrivains qui se sont occupés d'Alexandre VI peuvent se diviser en trois classes : les ennemis, les indifférents, les défenseurs.



A suivre..


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1866.. pages 129 et 130
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Message  Diane Mer 3 Nov 2010 - 16:16

Parmi les premiers, nous citerons : 1° François Guichar din ou Guicciardini, Histoire d'Italie;

2° Burchard, Diarium ou Journal d'Alexandre VI;

3° Paul Jove, qui a écrit une histoire de son temps ;

4° Tomaso Tomasi, auteur d'une histoire de César Borgia ;

5° Machiavel , ennemi et admirateur du même Borgia. Il faut joindre à ces témoins à charge les écrivains postérieurs qui s'en sont servis pour accuser Alexandre VI, savoir : Voltaire et tous ceux qui le suivent; M. Marie Lafon, dans sa Rome moderne; M. Challamel, dans son Histoire des Papes; l'anonyme qui ne fait que reproduire Voltaire dans Rome et Paris ou la Question romaine par Arouet de Voltaire; M. La Rochelle, dans la brochure que nous avons nommée plus haut; enfin Bianchi Giovini, dans une infâme brochure publiée en 1861 à Florence, sous ce titre: il Diario di Burcardo, Quadro dei costumi délia corte di Borna.

Nous rangeons parmi les indifférents ceux qui nous paraissent n'avoir pas eu de parti pris contre Alexandre VI, et qui ont voulu le juger avec impartialité; mais nous devons dire que le jugement de ces indifférents est généralement défavorable au Pape, qui se trouve seulement déchargé par eux d'un certain nombre de crimes. Tels sont : le continuateur de Fleury, dans son Histoire ecclésiastique; l'auteur de l'article Alexandre VI, dans la Biographie universelle de Didot, et l'auteur de l'article consacré au même Pape, dans le Dictionnaire encyclopédique de la théologie catholique, qui se montre en général sévère pour plusieurs Papes dont la mémoire a été certainement trop chargée.

Voici maintenant la liste des ouvrages dans lesquels nous avons plus particulièrement puisé les éléments de notre étude sur Alexandre VI :

1° Rohrbacher, Histoire universelle de l'Église catholique, liv. LXXXUI.

2° Roscoé, Vie de Léon X.

3* C. Tullio Dandolo, Roma ed iPapi, t. II, Milan, 1857.

4° Audin, Histoire de Léon X, Paris, 1844.

5° L'abbé Jorry, Histoire du pape Alexandre VI, Paris, 1851.

6o J. Favé, Études critiques sur l'Histoire d'Alexandre VI, Saint-Brieuc, 1859.

7° Dublin Review, n° XC, janvier 1859 ; article intitulé : History in fiction.

8° L'abbé Constant, Y Histoire et l'infaillibilité des Papes, Lyon, 1859.

Les études critiques de M. Favé, qui ne sont pas assez connues, l'Histoire de M. l'abbé Jorry et l'article de la Revue de Dublin tranchent à nos yeux la question, et ne peuvent laisser de doutes sur l'odieuse conspiration de calomnies dont le pape Alexandre VI fut la victime.


A suivre...


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Message  Diane Jeu 4 Nov 2010 - 16:29

Les catholiques, qui ont horreur du mensonge et qui ne peuvent comprendre à quel degré d'impudence est capable de s'élever la haine de leurs adversaires, sont assez souvent portés à leur faire toutes les concessions qui ne compromettent pas la foi elle-même; plusieurs, après nous avoir lu, hésiteront peut-être encore à admettre que la calomnie ait été si audacieuse à l'égard d'Alexandre VI, et ils se diront qu'il doit y avoir au moins quelque chose de vrai dans tant d'accusations qui s'élèvent contre le Pape de la fin du quinzième siècle. Ils croiront volontiers que Voltaire et ses copistes, et que de fougueux protestants du seizième siècle n'aient pas reculé devant le mensonge et devant les plus audacieuses inventions, mais comment admettre que des historiens comme Guichardin, comme Paul Jove, et un familier même d'Alexandre VI, Burchard, qui mourut évêque de Città di Castello, aient pu accumuler à ce point les calomnies?

Nous répondrons à ces hésitations en montrant aussitôt quelle foi méritent les historiens et les écrits qui forment comme l'arsenal où les ennemis d'Alexandre VI vont puiser leurs armes.

Machiavel peut être tout d'abord mis hors de cause, il est connu. Ce Florentin, qui passa une grande partie de sa vie à conspirer, une autre à écrire d'impures comédies, est l'auteur du livre Du prince, qui est devenu le manuel des ambitieux, des fourbes et des scélérats. Son admiration pour César Borgia, qu'il haïssait, serait à elle seule une accusation contre ce personnage, si l'on pouvait se fier à la bonne foi de Machiavel. Il ressort d'ailleurs de son récit que César Borgia n'agit, dans plusieurs circonstances, que sous le coup d'une impérieuse nécessité, et ce n'est pas-dans Machiavel qu'on trouve les indignes calomnies dont est souillée la mémoire d'Alexandre VI.


A suivre ...

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1866.. pages 132 et 133

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Message  Diane Ven 5 Nov 2010 - 16:30

Guichardin était aussi Florentin. Il avait vingt ans à la mort d'Alexandre VI. Élevé sans doute par un des disciples de Savonarole, de ce moine extraordinaire qu'on serait tenté de ranger parmi les plus saints réformateurs s'il ne s'était pas mis en révolte contre le Saint-Siège, il avait hérité de l'irritation des moines de Florence contre Alexandre VI. Pour avoir une idée de sa bonne foi et de son impartialité lorsqu'il s'agit des Souverains-Pontifes, il suffit de dire qu'il représente, dès le commencement de son ouvrage, saint Grégoire VII comme le vil amant de la comtesse Mathilde, et qu'il traite de bâtards les enfants légitimes qu'eut lnnocent VIII avant d'entrer dans les ordres sacrés. Sa mauvaise foi est telle que l'incrédule Bayle dit, dans son Dictionnaire philosophique : « Guichardin mérite la haine, il se rend coupable de la faute des gazetiers; » et que Voltaire lui-même l'accuse d'imposture à propos de la mort d'Alexandre VI 1.

Au reste, on a le jugement de Guichardin lui-même sur son œuvre; ce jugement, donné en face de la mort, ne saurait être récusé par personne. Quelque temps avant de mourir, Guichardin fit venir un notaire pour lui dicter ses dernières volontés. Le notaire lui demanda ce qu'il fallait faire de son Histoire d'Italie, qu'il laissait en manuscrit : « Qu'on la brûle! » répondit-il. Nous ne contestons ni les brillantes qualités de l'historien, ni les vertus même de l'homme privé, mais nous sommes en droit de récuser Guichardin quand il témoigne contre les Papes.

Paul Jove, zélé partisan des Médicis et ami de Jules II qui, n'étant que cardinal, avait eu à se plaindre d'Alexandre VI, comme on le verra dans le cours de cette histoire, ne mérite pas plus de créance que Guichardin en ce qui touche le Pape dont nous nous occupons. C'était un écrivain vénal et passionné, qui avoue lui-même « qu'il avait deux plumes, l'une d'or, l'autre de fer, pour traiter les princes selon les faveurs ou les disgrâces qu'il en recevait. » Bayle dit de lui dans son Dictionnaire: « Jacques Gohorri n'a pas fait difficulté de dire que les aventures d'Amadis paraîtraient aussi vraisemblables que les histoires de Paul Jove. Selon Vossius, il avait monté une espèce de banque et promis une ancienne généalogie et une gloire immortelle à tous les faquins qui paieraient bien son travail, et il déchirait tous ceux qui n'achetaient pas ses mensonges. »


À suivre...


1 Dans sa Dissertation sur la mort de Henri IV


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1866.. pages 133; 134;135
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Message  Diane Sam 6 Nov 2010 - 15:25

Tomaso Tomasi, dit M. Favé, était compatriote de Gui-chardin et de Paul Jove ; il semble s'être proposé deux buts : l'un, de faire sa cour à la duchesse de Florence, princesse de la famille des la Rovère, en dénigrant le Pape que le cardinal de Saint-Pierre-ès-Liens (Jules II) avait combattu ; l'autre, de montrer en César Borgia un type de monstruosité à laisser loin derrière lui l'imagination la plus dévergondée. C'est ce qu'a exprimé en d'autres ternes Antoine Varillas, dans son histoire de Louis XII 1 Reste Jean Burchard, natif de Strasbourg, maître des cérémonies de la cour de Rome depuis 1483, et mort plus tard évêque de Citta di Castello. Voyons quelle créance mérite le Diariun ou journal publié sous ce nom, et quel parti on en peut tirer.
Burchard était mort dans une heureuse obscurité, et quelques érudits à peine soupçonnaient qu'il eût écrit, lorsque 190 ans après sa mort, en 1636, un calviniste français vint présenter au luthérien Leibnitz, dans la ville de Hanovre, des feuilles éparses écrites les unes en français, les autres en italien, d'autres en latin. Leibnitz crut y découvrir des fragments du Diarium de Burchard, et il les publia dans son Histoire secrète, manifestant d'ailleurs dans une préface le regret de n'avoir pas pu se procurer le texte de Burchard. Onze ans plus tard, en 1707, La Croze trouva le Diarium dans la bibliothèque de Berlin, et Jean Eccard le publia en 1723, dans le tome II de son Corpus historicum medii cevi. Ce Diarium diffère en des points impor tants de celui qu'a publié Leibnitz.

Où est la version authentique? et quelle autorité peut-on accorder à un journal écrit contre un Pape, lorsqu'on voit qu'il est trouvé par des protestants dans des bibliothèques protestantes et édité par des protestants? Ce ne sont du reste pas là les seules éditions : on en a tiré de la bibliothèque Chigi et de la bibliothèque du Vatican ; les versions diffèrent encore et sont souvent contradictoires. Est-ce vraiment sur un pareil ouvrage d'une authenticité si contestable, d'une intégrité plus contestable encore, qu'on peut fonder une accusation sérieuse?

Mais on objectera qu'on peut au moins ajouter foi aux parties des divers manuscrits qui concordent entre elles. Soit! Il reste à savoir quelle foi mérite l'auteur lui-même. Or, voici ce qu'en dit Paris de Grassis 1 : « Non-seulement ce n'était pas un homme, mais le plus bête des bêtes; outre cela, il était très-méchant et très-envieux. Il a composé des livres que nul ne peut comprendre si ce n'est la sibylle ou le diable son complice; il les a écrits en caractères tellement indéchiffrables, raturés et altérés, que je croirais volontiers qu'il eut le diable pour complice. » Paris de Grassis était chanoine de Bologne et fut plus tard évêque de Pésaro. Son témoignage, s'il ne détruit pas l'autorité de Burchard, permet au moins de la discuter.



1 Favé, Études critiques.
1 Ex Diario, ad annum I506.



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Message  Diane Dim 7 Nov 2010 - 17:08

Mais l'œuvre de Burchard, telle qu'elle est parvenue jusqu'à nous, porte en elle-même des caractères de fausseté et de stupidités telles, qu'à elle seule elle suffit pour faire adopter le jugement du chanoine de Bologne. Audin, appréciant l'œuvre par elle-même, a ainsi jugé l'auteur : « A le lire, on croirait qu'il n'a pas quitté le Pape un seul instant : il le suit à la chapelle, au consistoire, à table, au lit ; la nuit n'a pas d'ombre dont il n'ait percé l'obscurité. C'est un être qui ne croit pas à la vertu, et qui, à l'aide d'un ducat, explique ordinairement une bonne pensée, une bonne action. Jamais romancier ne se joua avec une naïveté si bouffonne de la crédulité de ses lecteurs. D'Alexandre VI, la dissimulation personnifiée, il fait un héros de mélodrame qui vient afficher ses débordements aux yeux de Rome tout entière. Qu'un cardinal meure, il regarde dans le breuvage du malade, et presque toujours il y trouve des traces de poison. Pourquoi ce poison? C'est parce qu'Alexandre voulait s'emparer des dépouilles du prélat. Voltaire s'est spirituellement moqué, en sa qualité de poète tragique, de cette violation des premières règles de l'art dramatique :

« On prétend, dit-il, que, dans un pressant besoin d'argent, Alexandre voulut hériter de quelques cardinaux; mais il est prouvé que César Borgia emporta cent mille ducats d'or du trésor de son père après sa mort : le besoin n'était donc pas réel. D'ailleurs, comment se méprit-on à cette bouteille de vin empoisonné qui, dit-on, donna la mort au Pape? Si, quand le Pape mourut, cette cause de sa mort avait été connue, elle l'eût été par ceux-là ; mêmes qu'on avait voulu empoisonner ; ils n'eussent point laissé un tel crime impuni ; ils n'eussent pas souffert que César Borgia s'emparât paisiblement des trésors de son père... Il n'est pas difficile d'inventer quand on accuse. »

Si l'on pouvait croire à la narration de Burchard, Alexandre VI aurait été vraiment frappé d'idiotisme. Ce serait un Cassandre de comédie, cherchant exprès le grand jour pour rendre une ville, un pays, un monde entier témoin de ses folies, un crétin de la Maurienne étalant sur le grand chemin ses dégoûtantes infirmités. Jamais bonne femme ne fit comme le maître des cérémonies des contes à dormir debout. On dirait que, pour remplir ses pages de chaque jour, il faisait le métier de facchino, courant les rues, les hôtelleries, les marchés publics, les boutiques et les étalages ; et de tout ce qu'il avait entendu de la bouche de valets de place, de servantes d'auberge, de palefreniers, de barbiers, formait le soir un récit qu'il appelait son journal. C'est dans l'œuvre posthume de ce fouilleur d'égouts, qui n'était pas destinée à voir le jour, que beaucoup de nos historiens et de nos romanciers sont allés puiser, pour peindre Alexandre, des récits qu'ils nous ont donnés comme des documents officiels 1. »



1. Audin, Histoire de Léon I, chap. xI


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Message  Diane Lun 8 Nov 2010 - 17:12

Voilà l'homme qui a fourni les principales armes à ceux qui diffament Alexandre VI ! Mais, chose remarquable, c'est que ce Burchard, dont on fait tant de cas, fournit aussi des armes pour défendre le Pontife de plus d'une accusation. « Il y a quelques perles pourtant dans ce fumier de Burchard, dit encore Audin ; mais on prend bien garde de les en retirer. Ainsi ne dit-on rien de cet appel d'Alexandre à la chrétienté tout entière pour repousser le Turc, qui menaçait l'Occident et dont le triomphe eût entraîné la perte des lettres. C'est là, cependant, une noble et glorieuse pensée ! Dans sa rigoureuse justice, le Pape mit à contribution les trésors de ses cardinaux. Ascagne Sforza, riche de 30,000 ducats de rente, fut obligé d'en verser 3,000 dans la caisse instituée par le Pape ; le cardinal de Médicis (Léon X), 600 seulement, le dixième de ses revenus annuels; Cornaro ne dut rien payer, parce que, dit le journal de notre Allemand, il n'a pas de revenus, nulios habet redites. Or, ce Cornaro était un des cardinaux qu'Alexandre voulait empoisonner. »

Il y a bien d'autres accusations réfutées par le journal même de Buchard, soit lorsqu'il raconte les choses autrement que d'autres prétendus historiens d'Alexandre VI, soit lorsque son silence sur certains faits en démontre la fausseté. Ainsi Tomaso Tomasi cherche à rendre les Borgia responsables du meurtre d'Alphonse d'Aragon : le Diarium de Burchard ne dit pas un mot qui puisse confirmer cette insinuation. Tomasi parle de pamphlets venus d'Allemagne et raconte des scènes d'immoralité qui auraient eu lieu dans des banquets auxquels Alexandre et César Borgia assistaient : le Diarium ne parle nullement de ces scènes, et pourtant il fait mention des pamphlets, et dit que l'un d'eux fut montré au pape Alexandre, sans doute pour lui faire connaître la malignité de ses ennemis. Nous pourrions multiplier ces exemples.

Il reste donc déjà établi qu'il faut se défier de tout ce qui a été écrit contre Alexandre VI; nous espérons faire partager au lecteur notre conviction que non-seulement il faut s'en défier, mais qu'il faut absolument le rejeter. Ainsi il est possible de justifier Alexandre VI de toutes les accusations portées contre lui, et c'est un devoir de le faire. Mais l'historien de ce Pontife ne doit pas se borner à cette partie négative de la défense ; la justice demande qu'on aille plus loin : Alexandre VI n'a été ni un débauché, ni un prince perfide et cruel, ni un pontife scandaleux ; il fut un grand roi et un pontife remarquable et nous croyons que la Revue de Dublin est dans la vérité quand elle dit :…



A suivre...

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Message  Diane Mar 9 Nov 2010 - 16:57

« Il y a un témoignage positif à rendre en faveur de son caractère, témoignage aussi inconciliable avec les accusations dont il est l'objet qu'il le serait pour Grégoire VII lui-même. Le Bullaire de ce grand Pape a une remarquable valeur ; la liste de ses lettres et de ses autres écrits, composés pendant un Pontificat aussi court que troublé, est longue et fort variée et atteste à la fois son habileté, son énergie et son talent...

La vraie base sur laquelle on doit asseoir la défense d'Alexandre VI est celle-ci : toutes les accusations portées contre lui se résument à cela, qu'il s'est servi de César Borgia pour défendre les domaines pontificaux par la force des armes contre les princes italiens et leurs alliés étrangers. Ce qui prouve qu'il en est ainsi, c'est ce fait significatif que ceux qui l'attaquent le plus insistent principalement sur la conduite de César, et montrent qu'ils n'admettent pas, ou du moins qu'ils doutent qu'il soit légitime de défendre par les armes le patrimoine pontifical. Les accusations d'immoralité rappellent celles qui ont poursuivi les Grégoire VII, les Boni face VIII ou les Sixte IV ; il est facile de voir qu'elles proviennent de l'esprit venimeux d'une inimitié de parti ; elles sont réfutées par leur invraisemblance même et par leur atrocité, et par l'absence de tout témoignage impartial. Les seuls faits admis sans réserve ou établis sont ceux qui ont trait à la défense du patrimoine par la force des armes. Aucun de ceux qui reconnaissent la légitimité et l'importance de cette défense n'attaque Alexandre VI.

Si donc la cause d'Alexandre VI diffère de celle de quel- ques-uns de ses prédécesseurs et de ses successeurs, c'est simplement dans le degré de la calomnie. Encore peut-on douter qu'il y ait en cela quelque différence, quand on fait attention aux circonstances de temps et à a l'importance des questions qui excitaient contre lui le ressentiment de ces princes contemporains, dont les historiens à gages ont empoisonné les sources de l'histoire par des mensonges prémédités. Une fois donc qu'on fait attention à ces circonstances, on trouve que la situation d'Alexandre VI n'est pas autre que celles des Sixte, des Jules, des Innocent et des Grégoire. »

On le voit par les citations que nous avons faites, nous ne sommes pas seuls à nous engager dans la carrière : nous n'ajouterons rien par nous-même à la réhabilitation d'Alexandre VI, nous n'aurons qu'à grouper les témoignages pour en faire ressortir avec plus d'éclat la vérité.



A suivre...


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Message  Diane Jeu 11 Nov 2010 - 17:41

Nous diviserons notre travail en quatre parties. La première sera consacrée à l'histoire d'Alexandre VI jusqu'à son Pontificat ; nous étudierons dans cette partie l'homme privé, ce qui nous amènera à dire ce qu'on doit penser de la fameuse Lucrèce Borgia. Dans la seconde partie, après avoir jeté un rapide coup d'œil sur la situation de Rome, des États pontificaux, de l'Italie, de l'Europe chrétienne et du monde au moment de l'exaltation d'Alexandre VI, nous raconterons les circonstances de son élection. La troisième partie sera consacrée à l'histoire du règne d'Alexandre VI comme souverain temporel. Nous aurons à étudier en même temps, le rôle et le caractère de César Borgia. La quatrième partie nous fera connaître les actes du Pontife. Chemin faisant nous réfuterons les calomnies et les mensonges des historiens et des romanciers.

A suivre ...


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Message  Diane Ven 12 Nov 2010 - 17:12

ALEXANDRE VI AVANT SON PONTIFICAT.


Il y avait à Valence, en Espagne, une ancienne famille du nom de Borgia ou plutôt Borja, très-ancienne dans le pays, et que quelques-uns font même descendre des anciens rois d'Aragon. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'elle occupait un rang distingué à Valence, et que le nom de Borja est celui d'une ville d'Aragon. Cette famille eut la gloire de fournir à l'Église deux Papes : Calixte III et Alexandre VI, et un grand saint, saint François de Borgia. Une sœur de Calixte III, nommée Jeanne ou Isabelle, les historiens ne sont pas d'accord sur ce point, épousa Godefroi Lenzuoli ou Lenzoli, qui était également d'une famille distinguée, et peut-être même le chef de la branche cadette de la famille Borgia. Lenzuoli fut revêtu de plusieurs charges considérables à la cour d'Espagne et obtint le gouvernement de plusieurs places importantes.

On ne sait pas combien Godefroi Lenzuoli eut d'enfants, mais il est probable qu'il en eut plusieurs et au moins deux garçons. L'un deux se nommait Pierre-Louis. Quant à celui qui devait un jour porter la tiare pontificale, il naquit à Valence, en 1431, et reçut le nom de Roderic ou Rodrigue. Il parait que Lenzuoli avait ajouté à son nom celui de sa femme, car on voit que Pierre-Louis et Roderic s'appelaient indifféremment Lenzuoli ou Borgia.

Quoi qu'il en soit, Roderic annonça dès ses premières années des dispositions peu communes et une grande aptitude aux affaires. Son père le confia aux meilleurs maîtres et lui fit poursuivre ses études jusqu'à l'âge de dix-huit ans. Alors il lui confia d'importantes affaires, des procès à débrouiller, et le jeune homme s'en acquitta avec tant de bonheur, qu'il songea à poursuivre une carrière qui s'ouvrait pour lui sous de si brillants auspices. Mais, doué d'une nature vive et mobile et d'une ardente imagination, il quitta tout à coup la profession d'avocat pour embrasser la carrière des armes. Il ne tarda pas à se faire remarquer là comme ailleurs, et l'on pouvait croire que la gloire militaire l'emportait à ses yeux sur toutes les autres, lorsque l'élection de son oncle Alphonse Borgia, qui prit le nom de Calixte III, vint encore une fois changer ses résolutions.

Calixte III connaissait la haute intelligence de son neveu; il désira l'avoir auprès de lui et l'appela à Rome, où Roderic Lenzuoli ne se rendit qu'à regret, et vaincu par les pressantes sollicitations du Pontife. Afin de fournir au jeune Roderic le moyen de soutenir son rang, Calixte lui donna en commende l'archevêché de Valence. Voici ce qu'on entendait par commende. Les abbayes, les évêchés et autres bénéfices ecclésiastiques pouvaient, par suite des dons des fidèles ou de la réduction du nombre des religieux et de ceux qui en jouissaient, avoir des revenus considérables et exorbitants. Dans ce cas, le Souverain-Pontife faisait deux parts des revenus ; il en laissait une au titulaire abbé ou évêque, sous le nom de mense (table), et il attribuait l'autre à un commendataire, administrateur purement temporel et séculier. Il y eut des abus, surtout lorsque les commendes étaient à la disposition des rois ; il y en eut moins dans les pays où elles restaient à l'entière discrétion de l'autorité ecclésiastique.

Au reste, en ce qui concerne Roderic Borgia, Calixte III ne faisait que suivre un usage ancien, qui ne peut nuire en rien à la réputation du commendataire. C'est ainsi que le jeune Borgia devint commendataire de l'archevêché de Valence ; il n'y aurait eu abus que s'il s'était servi contrairement aux intérêts de l'Église des revenus ecclésiastiques dont il jouissait.



À suivre...


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Message  Diane Sam 13 Nov 2010 - 17:26

L'a-t-il fait? Est-il vrai que ses mœurs le rendissent, dès cette époque, indigne de la faveur et de la confiance de son oncle, qui le créa cardinal dans cette année 1456? C'est ce qu'il faut examiner.

Disons d'abord que le cardinalat, pas plus que la commende, n'entraînait pour celui qui en jouissait l'obligation d'entrer dans les ordres sacrés. Le commendataire était même ordinairement un séculier ; il y a plus d'un exemple de cardinaux qui n'entrèrent jamais dans les ordres, quoiqu'il soit aujourd'hui de règle qu'un séculier nommé cardinal doive recevoir le sous-diaconat. Mais il n'en reste pas moins que le cardinal et le commendataire ont toujours été obligés de mener une vie régulière, et que l'on reproche à Roderic Borgia d'avoir été, après 1456 comme avant, un débauché et un scandaleux.

Aucun historien sérieux ne conteste que Calixte III ait été un Pontife pieux et vénérable : il faut donc qu'il ait ignoré les déportements de son neveu pour le créer cardinal et lui conserver sa faveur. Le Pontife fut-il trompé?

C'est ici que Burchard, Tomasi, Paul Jove et Guichardin crient unanimement au scandale, mais ils ne s'accordent ni sur la gravité ni sur les circonstances du scandale. Guichardin est le moins affirmatif de tous ; il se contente des formules on dit, on rapporte. Les autres ne donnent môme pas uniformément le nom et la condition de la femme qui aurait eu des relations coupables avec le jeune militaire, relations qui se seraient continuées plus tard : l'un parle de Rose ou Catherine Vannozza ou Zanozza ; un autre en fait une jeune fille, un autre une femme mariée. Nul accord ni sur le nom, ni sur les prénoms, ni sur la qualité. Qu'était cette femme? Où était-elle née? Quand est-elle morte? On n'en sait rien, et ce sont les ennemis les plus acharnés d'Alexandre VI, des contemporains, qui laissent subsister tant d'incertitude sur un point qu'il était alors facile d'éclaircir, et qu'ils avaient tant d'intérêt à établir ecclésiastiques dont il jouissait.


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Message  Diane Dim 14 Nov 2010 - 17:00

Admettons un moment que Roderic Borgia ait eu de la Vannozza les enfants qu'on lui donne, savoir : Jean ou François, qui devint duc de Gandie, nom d'une ville du royaume de Valence ; César, le plus célèbre de tous, plus tard duc de Valentinois; Guifry, Guifre ou Joffred, prince de Squillace ; la fameuse Lucrèce dont nous nous occuperons plus loin ; un cinquième enfant dont le nom est inconnu. Il résulte du témoignage des ennemis mêmes d'Alexandre VI, qu'il eut tous ces enfants plus de vingt ans avant de monter sur le trône pontifical, et avant d'entrer dans les ordres sacrés, ce qui parait n'avoir eu lieu qu'eu 1478, lorsque Sixte IV nomma Roderic Borgia évêque d'Albe, puis de Porto. On pourrait donc, à la rigueur, reprocher à Alexandre VI les désordres de sa jeunesse; on n'aurait rien à reprocher, sous ce point de vue, à l'ecclésiastique, à l'évêque et au Pape ; les désordres du militaire, s'il les a expiés et s'il s'en est repenti, ne peuvent retomber sur le prêtre. De pareils désordres n'ont empêché ni les Augustin, ni les Ignace de Loyola de devenir de grands saints.

Mais on prétend que la vie d'Alexandre VI aurait dû changer à partir de l'année 1456, puisqu'il devint, à partir de cette époque, bénéficier ecclésiastique et cardinal. Ici se présente une seconde version qui justifie plus complètement Alexandre VI. Le savant Marini, dans son Dictionnaire historique , article Borgia, dit que, selon des historiens recommandables, ce Pape eut, dans sa jeunesse, de Julie Farnèse, quatre garçons et une fille. Orlandini affirme la même chose dans son Histoire de saint François de Borgia; même affirmation dans une autre histoire du même saint, écrite par un anonyme, dédiée au roi, et imprimée à Paris, en 1672 par Denis Thierry.

On peut regretter que ces auteurs ne disent pas formellement si Julie Farnèse était légitimement mariée à Roderic Borgia, mais il y a des faits qui ne permettent guère d'en douter. L'historien Philippe de Commines ne donne nulle part, dans ses Mémoires, la qualification de bastards aux enfants d'Alexandre VI, et l'on sait que cet historien n'épargne guère cette qualification, même aux princes du sang, quand il y a lieu de l'appliquer. Le tableau du règne de Charles VIII, composé sur les écrivains contemporains et inséré dans la collection Petitot (Mémoires relatifs à l'Histoire de France) n'emploie pas davantage cette épithète.

S'il est probable que Julie Farnèse n'est autre que la Vannozza, il devient aussi probable qu'elle était unie à Roderic Borgia en légitime mariage ; le témoignage intéressé et si souvent trompeur de Paul Jove, de Tomasi et autres pourrait tout au plus faire conserver quelques doutes. Mais ces doutes disparaissent quand on songe que les Farnèse appartenaient à une famille romaine qui pouvait marcher de pair avec les Borgia, et qu'une union illégitime si longtemps prolongée eût été impossible entre deux membres de ces maisons.


à suivre..


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Message  Diane Lun 15 Nov 2010 - 17:03


Si une Farnèse eût oublié ses devoirs, nul doute qu'une haine implacable, une vendetta italienne n'eût animé pour longtemps ses nobles parents contre le séducteur. Or, c'est le contraire que montre l'histoire, même telle que l'ont faite les ennemis d'Alexandre VI. On voit le cardinal Farnèse, depuis Pape sous le nom de Paul III, chargé des missions les plus délicates, et dévoué à ce Pontife, même à une époque où on parlait de le déposer, c'est-à-dire lorsque Rome était occupée par une armée française. Un autre Farnèse, Ange-Ferdinand, servit dans l'armée de César Borgia et se fît tuer à son service. La faveur dont jouirent les Farnèse pendant tout le pontificat d'Alexandre VI trouve son explication naturelle dans l'alliance antérieure du Pontife avec Julie Farnèse 1.

Ne peut-on pas conclure de là que la naissance des enfants de Roderic Borgia fut irréprochable, qu'il était légitimement marié à Julie, et qu'il n'entra dans les ordres sacrés qu'après la mort de cette femme. Il est probable seulement que, étant bénéficier ecclésiastique, il tint son mariage secret, afin d'éviter toutes les récriminations qu'on aurait pu faire entendre.

Si l'on rejette l'explication qui précède et qui explique si naturellement la conduite d'Alexandre VI, il faut admettre des hypothèses qui conduisent d'absurdités en absurdités. Les ennemis d'Alexandre le représentent comme un homme d'une rare prudence, qui chercha, pendant des années entières, à tromper les cardinaux sur son compte, marchant dans les rues de Rome les yeux modestement baissés, passant ses journées à visiter les églises, les monastères et les hôpitaux, faisant toutes sortes de bonnes œuvres, et ils voudraient nous faire croire que cet hypocrite, que cet homme si adroit et si prudent, et qui se préparait de si longue main l'accès au trône pontifical par l'apparence de toutes les vertus, aurait entretenu un commerce illégitime avec une femme pendant plusieurs années, l'aurait menée partout avec lui, aurait reconnu ses enfants publiquement et à la face du ciel, aurait enfin affiché lui-même son ignominie et se serait glorifié de ses scandales !

Quelle contradiction dans le même homme! quelle folie! quel cynisme incroyable! Dire de lui qu'il cherchait à en imposer aux cardinaux par une feinte piété, et qu'en même temps il reconnaissait ses bâtards, c'est lui décerner un brevet de stupidité, et supposer ses lecteurs dignes d'en recevoir un autre. En voulant trop prouver, les ennemis d'Alexandre VI ont détruit leurs prétendues preuves; leurs absurdes contradictions réduisent à rien leur témoignage.


A suivre...



1 J Favé, Études critiques.


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Message  Diane Mar 16 Nov 2010 - 17:57

Aux lecteurs de bonne foi qui ne pourraient encore se résoudre à croire un tel excès de calomnies, nous dirons avec la Revue de Dublin : « Ce qu'il y a de vrai à l'égard d'Alexandre VI, c'est que bien peu d'écrivains sont au courant du sujet. La foule se contente de suivre la tradition ; il n'y a pas une personne sur un million qui songe à faire une enquête sérieuse. Le petit nombre de ceux qui l'ont faite ont reconnu la fausseté des accusations; non-seulement ils les ont trouvées fausses, mais ils ont reconnu qu'il n'y a pas môme le plus petit motif d'y accorder quelque créance. Jamais, probablement, il n'y eut moins de prétexte pour croire à la calomnie que dans le cas d'Alexandre VI. Créé cardinal par un pieux et véné rable Pontife, il fut envoyé, par le prudent et habile Sixte IV, dans une circonstance critique, comme légat du Pape en Espagne, son pays natal, où son caractère devait être bien connu ; en même temps était envoyé en France, pour une mission semblable, le célèbre cardinal Bessarion, que les écrivains protestants représentent comme le plus savant et le plus éloquent, aussi bien que le plus pieux et le plus sage des cardinaux, et comme un homme dont la conduite avait toujours été conforme à sa dignité. Est-il croyable que, dans le même temps, le même habile et sage Pontife eût envoyé, pour une mis- sion semblable, un débauché, un homme absolument dépravé?

Et pourtant, si l'idée qu'on se fait habituellement d'Alexandre VI est juste, il était à cette époque au milieu même de sa carrière de vices! il était dans la force de l'âge, en pleine possession des honneurs, de la vigueur et de la puissance ! Ce n'est pas tout. Il avait un rival, un rival jaloux de sa fortune, le cardinal de Pavie, qui était intéressé à examiner de près sa conduite, qui avait désiré remplir l'honorable mission dont on le chargeait, et qui cherchait à lui nuire en médisant de lui. Qu'a-t- on dit de lui cependant? Rien de plus que ce qu'on a dit de Beaufort, de Wolsey, de Léon X, des prélats les plus- distingués de cette époque, tous accusés comme lui de luxure, d'ambition, etc., sans qu'il y eût jamais que de vagues imputations dépourvues de preuves positives. C'était précisément vingt ans avant qu'il ne fût élu Pape; par conséquent César et Lucrèce, s'ils sont vraiment ses enfants, étaient nés alors, et ceux qui l'accusent de dépravation nous disent que cette dépravation était notoire, publique, connue de tous, précisément à cette époque de sa vie!

Il est donc évident que le simple rapprochement des faits et des dates met à néant la calomnie; semblables à des témoins parjures, les calomniateurs d'Alexandre VI ont été trop loin ; ils ont trop voulu prouver, ils ont dé- passé le but, et ils ont ainsi détruit eux-mêmes la confiance qu'ils pouvaient inspirer. Voltaire lui-même a vu clair à travers leurs mensonges; il s'est moqué de la crédulité de ceux qui croyaient à leurs récits contradictoires. Chose étrange! il y a encore des catholiques qui y croient; il y a des catholiques qui s'attachent encore avec une étonnante ténacité à ces fausses traditions dont les incrédules eux-mêmes ont fait l'objet de leurs plaisanteries! »



À suivre..



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Message  Diane Mer 17 Nov 2010 - 15:59

Ainsi, il reste démontré que si Alexandre VI a eu les cinq enfants qu'on lui attribue, il les a eus longtemps avant d'être Pape, avant d'être engagé dans les ordres sacrés, et qu'il les a eus en légitime mariage. Il n'y a rien, dans sa jeunesse et dans son âge mûr, qui accuse en lui une vie de désordre et d'immoralité.

Nous oserons aller plus loin, avec la Revue de Dublin, et nous dirons qu'il n'est pas même certain que César, Lucrèce et les autres fussent ses enfants. Un fait incontestable, c'est qu'on n'avait jamais entendu parler de sa paternité avant l'explosion d'inimitié contre lui que provoqua son énergique gouvernement, quoiqu'elle dût être notoire et publique depuis au moins un quart de siècle. À l'occasion de l'élévation de César au cardinalat, des témoins attestèrent par serment que César et Lucrèce avaient un autre père qu'Alexandre, sans doute le frère de ce Pontife. On pourra dire que ces attestations étaient fausses, que les témoins se parjuraient, mais il est certain que personne ne le dit alors, et il est téméraire de rejeter ainsi les dépositions faites sous la foi du serment, à cause d'assertions contraires émises plus tard par des intéressés. On sait que c'était l'usage des Papes, dans ces temps de troubles, de choisir quelqu'un de leurs parents, le plus souvent un de leurs neveux, homme d'énergie et de talents militaires, pour diriger la défense des domaines pontificaux contre les États ambitieux qui les entouraient et qui cherchaient continuellement à les envahir.

Il était aussi d'usage que les Papes donnassent le nom de fils à ces parents, et telle est probablement la seule base sur laquelle l'esprit de haine appuie ses calomnies. Nous ne prétendons pas, qu'on le remarque bien, que César n'ait pas été le fils d'Alexandre VI, nous disons que le doute est permis à cet égard; trop de Pontifes, universellement reconnus comme bons et saints, ont été sujets aux mêmes calomnies, pour qu'on admette sans restriction une paternité qui n'aurait pas d'autre fondement que les assertions des historiens ennemis d'Alexandre VI.


A suivre..



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Message  Diane Jeu 18 Nov 2010 - 16:30

Des ennemis de Roderic Borgia l'ont calomnié même dans ses enfants ou ses prétendus enfants, dans César et dans Lucrèce Borgia, et ils ont affirmé que le Pape n'avait été ni moins pervers, ni moins hideusement débauché que le militaire et le jeune cardinal. Il faut bien les suivre sur ce terrain, malgré la répugnance que nous éprouvons à traîner les lecteurs dans ces bas-fonds de la plus audacieuse calomnie; ils nous le pardonneront : c'est pour venger la vérité, pour venger la mémoire d'un Pontife indignement outragé que nous remuons cette fange; il y a des opérations qu'il faut se résoudre à faire, malgré le dégoût qu'elles inspirent.

Ceux qui accusent Alexandre VI d'immoralité disent donc qu'il a porté sur le trône pontifical les mœurs de sa jeunesse; ils disent que la Vannozza vint à Rome auprès de lui; ils racontent des scènes hideuses de courtisanes admises dans les festins du Pontife ; enfin, ils ne reculent pas devant des accusations d'inceste, et cherchent à souiller la mémoire du père des crimes de sa fille ou prétendue fille Lucrèce Borgia.

Tomaso Tomasi et Burchard, si tant est qu'on puisse attribuer à ce dernier tout ce qui se trouve dans le Diarium, édité par des protestants, racontent que, pendant que l'armée française était encore à Rome, lors de l'invasion de Charles VIII, des maraudeurs pillèrent l'hôtel de la Vannozza, et prirent tout ce qu'elle avait amassé depuis le pontificat de Calixte jusqu'à celui d'Alexandre. Or, il y avait longtemps, à cette époque, que Vannozza ou Julie Farnèse avait disparu de la scène et sans doute du monde ; aucun historien ne l'a fait assister à Rome au triomphe d'Alexandre VI; ni Guichardin, ni Lavigne, ni Commines, qui étaient à Rome avec Charles VIII, ne disent mot du fait raconté par Burchard et Tomasi; Sannazar et Pontanus, qui ne ménagent pas Alexandre, n'en disent pas davantage, et si le fait était vrai, il serait plus qu'étonnant que les cardinaux ennemis du Pape ne s'en fussent pas servis contre lui. C'en est assez sur cet absurde conte.



À suivre...

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