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Des inimitiés

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Message  Sandrine Lun 6 Avr 2009 - 14:50

SERMONS pour l'avent, le Carême et les Fêtes, 1879

Des inimitiés

Homicide point ne seras de fait, ni volontairement. C'est avec beaucoup de raison qu'on ajoute ces paroles de fait ni volontairementt, car les homicides actuels et de fait sont rares; mais homicides de volonté sont en grand nombre; il n'est rien de si commun dans le monde que les inimitiés; et saint Jean l'Evangéliste dit : Celui qui hait son frère chrétien est homicide ( 1. Joan. 3, 15) .
Pour traiter utilement ce sujet, je diviserai mon discours en deux points : au premier nous verrons les causes qui ont coutume d'engendrer et de fomenter les inimitiés; au second, nous verrons les motifs qui les doivent étouffer en nos coeurs.
Un des principaux, c'est l'imitation de votre grande charité, ô sainte Vierge ! Vous êtes cette sacrée litière que le mystique Salomon s'est fabriquée d'étoffe incorruptible pour lui servir de demeure. Votre âme sainte, qui est le dedans de cette litière, est tout ornée de charité. Le milieu de cette litière, c'est votre sein immaculé, et c'est la charité divine, le Saint-Esprit qui est l'amour personnel, qui a tapissé ce sein virginal; c'est lui qui a formé la sacrée sainte humanité pour y asseoir le vrai Salomon, la sapience éternelle, ainsi que l'ange vous prédit quand il vous salua par ces paroles : Ave, Maria.

Exorde
. - Encore que le Fils de Dieu ait dit à ses disciples au chapitre 6e de saint Matthieu : Vous avez ouï qu'on a dit aux anciens : Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi; et en saint Jean, chapitre 13e : Je vous donne un nouveau commandement, que vous vous entr'aimiez ; si est-ce que le commandement du pardon des injures et de la charité envers nos ennemis, n'est pas si propre à la loi évangélique, qu'il n'ait été en usage en la loi de nature, en la loi mosaïque et même parmi les payens les plus modérés et vertueux.
Job était en la loi de nature, et le Créateur lui disait : Je veux que vous ayez la paix et que vous soyez en bonne intelligence avec ceux mêmes qui vous offensent actuellement.

Il fait allusion à une maudite coutume qui était autrefois au pays des Arabes, entre lesquels le saint homme Job vivait; coutume arabesque et barbare. Il dit que les arabes commettaient encore de son temps un crime : c'est que quand quelqu'un avait un ennemi, il allait mettre plusieurs pierres en son champ ou héritage, et ces pierres étaient comme un défi ou plutôt une déclaration de guerre et d'hostilité, par laquelle on faisait savoir au maître de ce champ, que s'il était si hardi que de cultiver son héritage on l'assommerait à coups de pierre. Si bien que cum lapidus regionum pactum tuum, c'est-à-dire : Je veux que vous tâchiez d'avoir la paix et vous réconcilier, non seulement avec ceux qui vous ont autrefois désobligé, mais encore avec ceux qui vous offensent présentement, qui vous dressent des embûches et qui conspirent votre mort.
Et en la loi mosaïque, il est dit en l'Exode : Si vous rencontrez le boeuf de votre ennemi qui se soit égaré, vous le ramènerez à son maître; si vous voyez l'âne de celui qui vous veut du mal, qui soit tombé sous le faix, vous ne passerez pas outre, mais vous l'aiderez à le relever.

Que si le Fils de Dieu a dit : Je vous donne un commandement nouveau, c'est-à-dire très excellent, à la façon des Hébreux, qui appellent nouveau tout ce qui est excellent : Cantate Domino canticum novum; ou en second lieu: Novum effective, comme Pallida mors, disent saint Augustin et Bède, parce que la charité rend l'homme tout nouveau, redresse et renouvelle son intérieur; ou en troisième lieu, parce que les chrétiens le doivent garder avec un esprit et par un motif tout nouveau qu'ils doivent aimer leur prochain, non par inclination naturelle, mais par charité surnaturelle et pour l'amour de Dieu; ils le doivent aimer non seulement comme eux-mêmes, mais comme Jésus-Christ nous aime.
Commandement nouveau en quatrième lieu, parce quand le Fils de Dieu vint au monde, il était fort vieilli et presque mis en oubli, et le Sauveur l'a renouvelé; aussi ne dit-il pas : Vous avez lu qu'il est écrit; mais Vous avez entendu qu'on a dit : Dieu ne commande jamais la haine des ennemis; et ces paroles que Jésus-Christ rapporte sont tirées du chapitre 19e du Lévitique, où il y a seulement : Tu aimeras ton ami comme toi-même; et il n'est pas ajouté : Tu haïras ton ennemi; mais les Scribes et les Pharisiens, faisant une glose impertinente, une conséquence défectueuse, ont conclu : S'il nous est commandé d'aimer notre ami, donc, au contraire, nous devons haïr notre ennemi; et c'est contre cette conséquence que Jésus-Christ fait ce commandement : Ego autem dico vobis, et quant à moi je vous dis : Aimez vos ennemis.
Pour nous acquitter de ce devoir, il est à propos de considérer quelles sont les causes qui engendrent et nourrissent les inimitiés.

A suivre ....

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Baiser de Judas
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Message  Sandrine Lun 6 Avr 2009 - 21:51

PREMIER POINT. - 1) Premièrement, c'est quelquefois l'antipathie des naturels; il y a des personnes qui ont des génies si contraires, tant de disproportion et de disconvenance en leur complexion : ils ont des humeurs et des inclinations si différentes, qu'il est quasi impossible, naturellement parlant, de les joindre et accorder; l'un est gai, jovial, prompt, actif et grand parleur; l'autre triste, mélancolique, froid, pesant et silencieux; en ce cas, le plus expédient serait la séparation; mais quand elle est impossible, parce que c'est un mari et une femme, deux frères de même famille, ou deux bourgeois de même ville ou de même rue, alors il faut que la grâce prédomine et corrige la nature; il est vrai qu'on ne peut pas tout à fait arracher cette antipathie naturelle, éteindre et étouffer cette répugnance et contrariété d'humeurs; mais c'est une chose de sentir la tentation, et autre chose d'y consentir; quand vous pouvez gagner sur vous que de passer par-dessus cette aversion et vivre en bonne intelligence avec le prochain pour l'amour de Dieu qui le commande, vous méritez beaucoup, et vous avez tous les jours des occasions de former de riches couronnes que vous trouverez dans le ciel.

2) En second lieu, les jugements téméraires sont souvent cause des inimitiés. Il y a des esprits qui sont si délicats et sensibles aux moindres mépris, qu'ils s'ombragent de tout ; une parole qu'on aura lâchée un peu légèrement, une contenance mal interprétée, un manquement qu'on aura fait de les convier à quelque assemblée par oubli, les touche vivement, et ils s'imaginent qu'on l'a fait à dessein. Le remède en est facile, si on se veut faire tant soit peu de violence . Végèce traitant de l'art militaire, donne à tous les capitaines et généraux d'armée un avis très important : c'est que quand vous rangez vos escadrons en bataille, il faut donner à vos soldats telle posture, que vous jetiez le soleil aux yeux de votre ennemi : car, par ce moyen, vous l'éblouissez et le surmontez plus aisément. Il faut faire de même à celui qui vous veut du mal; pour vaincre sa volonté, il faut convaincre son esprit, parler ensemble, lui ouvrir votre coeur, l'éclaircir sur ce qu'il soupçonne, le rendre capable de la vérité, et vous-même vous en éclaircir. Et parce qu'il y a des gens qui, par superbe ou timidité, ne veulent pas, ou n'osent pas s'adresser les premiers à leur prochain, se découvrir à lui, et lui parler franchement, pour lui jeter le soleil de la vérité dans les yeux, il faut au moins en ce cas se servir de médiateur, entremettre un ami commun, un homme prudent et charitable ( ou une épouse aimante ) : le curé, le prédicateur ou le confesseur qui prennent la peine de parler à tous deux, les faire embrasser et moyenner une bonne paix .

A suivre ...

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Message  Sandrine Lun 6 Avr 2009 - 21:55

3) Mais qui croirait que le feu engendrât quelquefois la glace, que la paix apportât la guerre, et que l'amitié produisit des inimitiés; vous avez un ami que vous aimez par trop, vous épousez ses querelles, vous prenez la trempe de ses humeurs, vous vous rendez partisan de ses passions, vous vous déclarez ennemi d'un tiers qui était votre ami, ou qui ne vous a jamais désobligé, parce que votre ami lui veut du mal; ce n'est pas ce que le Saint-Esprit vous conseille : Noli pro amico fieri inimicus proximo ( Eccli. 6, 1 ) .
Tite-Live rapporte un beau trait, qui vient ici fort à propos; il dit que ceux de Capoue ayant guerre contre les Samnites, envoyèrent des ambassadeurs aux Romains, pour faire alliance avec eux, et leur demander secours contre ceux qui les attaquaient: la chose étant proposée au sénat, on fut en peine de ce qu'on devait faire; car d'un côté l'amitié de ceux de Capoue était d'importance à la république romaine, et on la jugeait nécessaire pour les affaires de la ville; d'ailleurs, les Samnites étaient confédérés avec les Romains, et on ne pouvait donner secours à ceux de Capoue sans violer les articles de l'alliance des Samnites. En cette perplexité, voici l'arrêt de la cour, et la réponse qui fut donnée de sa part par la bouche des consuls aux ambassadeurs de Capoue : Messieurs de Capoue, le sénat avoue que vous méritez qu'on vous donne secours, et nous le désirons bien fort; mais nous devons tellement faire alliance avec vous, que nous ne rompions pas une autre amitié plus ancienne; les Samnites sont nos alliés, nous ne pouvons les offenser sans offenser Dieu : ce que nous pouvons faire pour vous sans blesser notre conscience, c'est que nous enverrons des ambassadeurs aux Samnites nos alliés, pour les induire à se départir de cette guerre, et ne vous point faire tort.

Voilà qui nous apprend notre leçon ; voilà comment il faut faire quand vous avez un ami, il ne faut pas que l'amitié que vous lui portez engendre deux inimitiés; si vous épousez sa passion, si vous vous déclarez le partisan de sa rancune pour conserver un ami, vous vous faites deux ennemis, vous vous rendez ennemi de celui que votre ami persécute, et offensant Dieu par ce moyen, vous encourez son inimitié; il vaut mieux faire comme les Romains, étouffer la passion de votre ami, et renouer une bonne paix.

4) Mais la plus ordinaire cause des dissensions, c'est l'affection désordonnée qu'on a pour les biens de la terre. Un ancien nommé Héraclite étant prié de ses concitoyens de leur faire un discours pour les exhorter à la paix et leur enseigner le moyen de la bien établir, et cimenter parmi eux, prit un verre d'eau et y mêla un peu de farine, et l'avala; pour leur donner à entendre que s'ils se contentaient de peu, et s'ils retranchaient toute surperfluité, ils n'auraient point de guerre.
Les poètes disent que c'est Bellone, une mégère et une furie infernale qui sème la zizanie dans les familles et jette la pomme de discorde entre les royaumes.
Non, dit saint Chrysostome, il n'est point d'autre mégère, point de Bellone qui allume le flambeau de la dissension, que ces deux furies : Meum ac tuum; et celui-là à mon avis a bien rencontrée qui a comparé l'amour des gens du monde, à celui des chiens de boucherie; vous voyez quelquefois à la boucherie deux ou trois chiens ensemble; qui ne saurait que ce sont des bêtes, penserait qu'ils sont les plus grands amis du monde; ils se jouent ensemble, ils couchent l'un auprès de l'autre, si on en frappe un, tous les autres aboient; voulez-vous rompre toute cette amitié apparente, faites que le boucher leur jette un os à ronger, ils ne se connaissent plus, ils grondent l'un contre l'autre, ils s'entrebattent et se mordent comme s'ils ne s'étaient jamais vus, c'est que chacun d'eux veut avoir toute la pièce. Telle est pour l'ordinaire l'amitié mondaine, tant qu'il n'y a rien à partager entre deux parents ou voisins, ils sont en bonne intelligence, ce ne sont que visites réciproques, que compliments et qu'offres de service : Je suis votre serviteur, disposez de moi, je vous suis tout acquis. Faites qu'il faille diviser la succession du père, ou de l'oncle entre deux frères, que l'un des voisins empiète tant soit peu sur l'héritage de l'autre, il n'y a plus alors d'amitié ni de partage; ce ne sont que plaintes, qu'injures, que malédictions et médisances.

A suivre ...



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Message  Sandrine Mar 7 Avr 2009 - 11:57

II. 1) Après ces quatre mères qui engendrent les inimitiés, viennent quatre nourrices qui les fomentent et entretiennent.
La première c’est la superbe. Pour moi, dit cet orgueilleux, je ne lui veux point de mal, mais je ne veux pas parler le premier ; je ne le veux pas saluer, je ne lui veux pas témoigner la bonne volonté que j’ai pour lui, cela l’élèverait par trop, il s’en tiendrait fier et arrogant, il dirait que j’ai été trop heureux de revenir et de le rechercher ; c’est lui qui m’a offensé, il est le plus jeune, je le pense bien valoir, c’est à lui à me rechercher le premier ?
Orgueilleux ! Ne savez-vous pas que Dieu résiste aux superbes ? Dieu vous a-t-il traité de la sorte ? N’est-ce pas vous qui l’aviez offensé ? N’êtes-vous pas le plus jeune et le plus petit ? Vous n’êtes qu’un néant au regard de Lui, et cependant Il vous a si souvent recherché par ses inspirations ? Il vous a offert son amitié, Il savait bien que la trop grande facilité avec laquelle Il vous avait autrefois pardonné, vous avait donné occasion de l’offenser plus librement, et Il n’a pas laissé de vous rechercher, et vous ne voulez pas pour l’amour de Lui rechercher votre semblable ?

2) En second lieu, on se flatte, on se trompe soi-même et on se forme une conscience erronée ; je suis de la confrérie du Rosaire, je communie tous les premiers dimanches du mois, je dis mon chapelet ; et ce qui est essentiel au christianisme, le point fondamental de la religion catholique, qui est la charité, on la néglige, on la laisse en arrière. Qui en sera responsable devant Dieu ? N’en demandera-t-on point compte au confesseur timide et muet ? N’aide-t-il point par sa lâcheté à fomenter cet abus ?

3) On s’accuse à lui d’avoir eu des disputes avec le prochain ; il ne demande point si cela est bien raccommodé ; il condescend par ignorance, par complaisance ou par timidité à la première excuse que le pénitent apporte pour ne pas se réconcilier ; il donne l’absolution à celui qui en est incapable ; il ne regarde pas le commandement de Jésus-Christ qui dit en l’Evangile : Si présentant votre offrande à l’autel, vous vous ressouvenez que votre frère chrétien a quelque chose contre vous, laissez là votre offrande, avant que de la présenter à Dieu, allez vous réconcilier avec votre prochain ; à plus forte raison , vous ne devez pas être reçu à confesse et à la participation des saints sacrements, tant qu’il y a en votre cœur quelque amertume volontaire contre un seul de vos prochains.

4) A cela derechef contribuent beaucoup les flatteurs et les rapporteurs, ces pestes de la république, ces boute-feux de discorde, ces incendiaires des âmes ; ces âmes, ces hommes à double langue, ces langues de serpent, ces langues fourchues et à double pointe, ces cerbères infernaux qui, pour avoir de franches repues, pour pêcher en eau trouble, pour s’entretenir aux bonne grâces de tout le monde, rapportent de côté et d’autre tout ce qui se dit et tout ce qui se fait : ils médisent de la belle-fille en présence de la belle-mère ; ils parlent mal de la belle-mère en présence de la belle-fille ; il vaudrait mieux que la ville fut peuplée de léopards, de lions et de loups que de telles gens ; on s’en donnerait de garde, on se retirerait, on leur fermerait la porte, on les tirerait à coups de fusil ; mais ces loups sont les bienvenus partout, ils marchent la tête levée, on les regarde comme la crème des compagnies ; ce lion est le galant homme, mais homme détestable et en abomination devant Dieu ! Il est appelé pécheur par excellence ; parce qu’il est responsable et punissable d’une infinité de péchés ; ce mari et cette femme, ce cousin et cette cousine, ce voisin et cette voisine qui vivaient en bonne intelligence, vous y avez mis la division par vos murmures et paroles de flatterie ; quand ils se haïssent, ils pèchent pour eux et pour vous ; quand ils se maudissent et disent des injures, quand ils se nuisent l’un à l’autre, ils pèchent pour eux et pour vous ; vous avez les mains sanglantes et criminelles devant Dieu, de tous les péchés qu’ils commettent en suite de la discorde que vous avez allumée entre eux.

A suivre ...

Eglise Saint Guénolé ( XVe siècle) à Batz-sur-Mer : Un homme déchiqueté par 7 monstres représentant les 7 péchés capitaux
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Message  Sandrine Mer 8 Avr 2009 - 10:40

DEUXIEME POINT. – III 1) Le Fils de Dieu arrête tous ces désordres par ce célèbre commandement qu’Il nous fait : Pour moi je vous dis : Aimez vos ennemis. Priez pour ceux qui vous persécutent et calomnient. Faîtes du bien à ceux qui vous haïssent. Pesons toutes ces paroles ; il demande de nous pour nos ennemis, le cœur, la bouche et la main. Aimez vos ennemis ; il ne dit pas : Laissez-les pour tels qu’ils sont, tenez-les pour indifférents, ne leur faîtes ni bien ni mal ; mais aimez-les, souhaitez-leur du bien, soyez bien aise quand il leur en arrive ; priez non seulement pour ceux qui vous ont autrefois persécuté, mais pour ceux qui le font encore maintenant et qui vous ruinent de réputation. Cela serait beau et bien chrétien, si vous entendiez quelquefois la messe, si vous disiez votre Rosaire, ou si vous faisiez une neuvaine pour celui qui plaide contre vous injustement, comme le bienheureux César de Bus. On lui dit un jour qu’un méchant médisait de son sacré Ordre : Il a gagné cela sur moi, dit-il, qu’au lieu que je ne priais Dieu pour lui qu’en général, je prierai pour lui tous les jours en particulier.

Il ne dit pas prier Dieu, mais priez, pour comprendre Dieu et les hommes ; comme fit ce dévot de notre temps à Paris, nommé frère Antoine. Un impudent lui donna un soufflet en pleine rue, parce qu’il lui remontrait son devoir ; ce bon homme s’informe quel est cet étranger, pour quelle affaire il est à Paris, et comme il avait entrée aux maisons des grands à cause de sa piété, il va de porte en porte, recommander avec grande affection l’affaire de cet étranger, qui, ayant eu un fort bon succès, un des officiers lui dit : Vous devez bien remercier frère Antoine ; car sans lui vous étiez en danger de ne pas réussir en vos desseins. Il s’informe qui est ce frère Antoine, il apprend que c’est celui à qui il a donné un soufflet ; il va le trouver, il se jette à ses pieds, lui demande pardon, se convertit et change sa mauvaise vie. Il faut faire ainsi : si votre ami, votre père ou quelque autre parent sont en crédit et peuvent aider votre ennemi, il les en faut prier, et de bonne façon.

Faîtes du bien à ceux qui vous haïssent ; et quel bien leur ferez-vous, quand vous refusez de les saluer, quand vous ne voulez pas leur dire une bonne parole ? Ne vous trompez point, ce n’est pas assez de dire : Je ne lui veux point de mal, je prie Dieu que le mal que je lui souhaite m’arrive ; vous êtes obligé de lui rendre les mêmes offices de charité et de civilité que vous rendez aux autres de même condition, aux autres qui vous sont parents en même degré que lui.

A suivre ...


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Message  Sandrine Mer 8 Avr 2009 - 13:54

2) 1. Pour vous, pour votre bien, bien honorable, bien agréable, bien profitable. Je ne sais quelle sotte erreur a ensorcelé l’esprit de plusieurs qui s’imaginent que c’est une lâcheté et un défaut de courage, de souffrir et pardonner une injure .

2. Le pardon des injures est une action très douce et agréable. Je n’en veux point d’autre preuve que votre propre expérience. N’est-il pas vrai que quand vous vous êtes surmonté généreusement vous-même, que vous avez pardonné de bonne façon à quelqu’un, et que vous avez renoué avec lui une parfaite amitié, vous vous sentez grandement allégé, et qu’il vous semble qu’on vous a déchargé d’un fardeau insupportable ; que votre cœur est vide de beaucoup de fiel qui vous remplissait d’amertume ? au lieu que quand vous avez un ennemi, vous êtes continuellement tourmenté, vous avez au dedans une vipère qui vous ronge le cœur incessamment : que toutes les prospérités qui lui arrivent vous sont autant d’afflictions d’esprit ; que tout ce que vous voyez qui lui appartient, vous met à la gêne et à la torture, que de vous souvenir seulement de lui, vous est un tourment insupportable ; et quand vous avez obéi à votre passion et exercé quelque vengeance, que de regrets par après, que de terreurs paniques et que d’inconvénients ?


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Message  Sandrine Mer 8 Avr 2009 - 14:25

3) Quel profit de s’entre-manger par procès, de s’entre-ronger par médisance, de s’entre-déchirer par calomnie, de se brûler pour échauffer les autres ? Ne vaudrait-il pas mieux gagner votre prochain par courtoisie, et vous le rendre ami et favorable.
Vous savez le beau trait de cet ancien roi nommé Scilurus. Il avait grand nombre d’enfants : étant au lit de la mort, il leur voulut laisser par testament la paix et l’union fraternelles, comme le plus précieux gage qu’il leur pouvait léguer. Il les fait tous assembler autour de son lit, il se fait apporter un paquet de flèches liées ensemble, il les donne à son aîné et lui commande de les rompre ; il n’en peut venir à bout, il les donne au second et lui fait le même commandement, et il ne les peut rompre non plus que son frère. Il les donne au troisième, au quatrième puis au cinquième, et ainsi consécutivement à tous les autres. Enfin, il les prit lui-même, et les ayant déliées, il les rompit fort aisément l’une après l’autre, puis leur fit cette leçon : Vous avez vu, mes enfants, que tant que ces flèches ont été liées, vous autres qui êtes plusieurs, jeunes, robustes et en bonne santé, ne les avez pu rompre ; mais quand elles ont été séparées, moi seul qui suis vieux, faible et malade, les ai rompues sans difficulté. Il en sera de même de vous tant que vous serez bien unis ensemble et en bonne intelligence : ni les guerres, ni les procès, ni les maladies, ni autres accidents de fortune ne ruineront votre maison ; mais si une fois vous vous divisez, si la pomme de discorde se jette parmi vous, le moindre désastre désolera et ruinera cette famille.

A suivre ...

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Scilurus sur son lit de mort demandant à ses fils de briser les flèches liées ensemble
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Message  Sandrine Mer 8 Avr 2009 - 19:24

4) Mais quand tous ces motifs d’honneur, de plaisir et de profit temporel ne vous toucheraient pas, au moins l’utilité spirituelle et le salut de votre âme vous doit-il émouvoir et convaincre ; car le meilleur moyen d’effacer toutes vos dettes sans demeurer reliquataire d’aucune peine à la justice de Dieu, c’est de quitter les dettes à ceux qui vous ont offensé ; les plus amples, les plus assurées et plénières indulgences que vous puissiez gagner, c’est de pardonner les injures qu’on vous a faites, le plus court et infaillible chemin du ciel, c’est d’avoir beaucoup de gens qui vous veuillent et fassent du mal, et les aimer de tout votre cœur ; il ne faut qu’ouvrir le Nouveau Testament pour trouver des passages en l’Ecriture, où Jésus nous promet de nous quitter toutes nos dettes, pourvu que nous pardonnions à nos prochains.

A suivre ...

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Message  Sandrine Mer 8 Avr 2009 - 19:27

Ceux qui ont tant soit peu lu les œuvres de saint Augustin, savent que sa mère sainte Monique était douée de toutes les vertus qu’on peut souhaiter en une sainte ; qu’elle était dévote, qu’elle ne manquait point d’assister tous les jours à la messe, qu’elle était si sage et adroite, qu’elle gagna, par sa prudence, son mari Patrice, et le convertit à la foi ; qu’elle était si chaste, que les langues les plus médisantes et vipérines ne trouvèrent jamais rien en elle, non seulement à reprendre, mais pas même à calomnier ; qu’elle était si ardente et zélée à la gloire de Dieu et au salut des âmes, qu’elle suivit son fils par mer et par terre, à Rome, à Ostie, à Milan, pour le retirer de l’erreur des Manichéens où il était abîmé ; chacun sait que l’eau du baptême de saint Augustin, a pris sa source en la fontaine des larmes que sa mère répandit en la présence de Dieu pour sa conversion ; et néanmoins quand saint Augustin, cet aigle des Docteurs, ce si excellent orateur prie pour l’âme de sa mère, quand il plaide devant le trône de Dieu, afin d’obtenir grâce pour elle, et la retirer du purgatoire en cas qu’elle y fût, il n’allègue pas sa dévotion, il ne dit pas qu’elle a entendu tant de messes, il ne propose pas sa chasteté, sa prudence, son zèle de la gloire de Dieu, la conversion de son mari et de son fils, il passes sous silence toutes les autres vertus pour alléguer seulement qu’elle pardonnait volontiers.
Hélas ! dit-il , mon Seigneur, je sais bien que ma pauvre mère a vécu fort chrétiennement, et suivant la direction de vos divines lois ; mais je sais bien aussi qu’elle a besoin de vos miséricordes : car, malheur à la vie la plus louable, si vous l’examinez sans miséricorde.
Et pour vous exciter à lui faire grâce, je ne vous allègue point d’autre motif, sinon que vous savez bien qu’elle a été miséricordieuse et qu’elle a toujours pardonné volontiers ; vous êtes donc obligé par votre parole, ô parole éternelle, de lui pardonner.
Grand Dieu ! que voulez-vous faire à ma mère ? Miséricorde ou justice. Miséricorde ; hé ! je vous la demande, je vous en prie de tous les efforts de mon cœur ! Justice ; oui j’en suis content, mais n’est-ce pas justice de garder ses promesses ? Or, vous avez promis que vous ferez miséricorde à quiconque fera miséricorde : ma mère l’a toujours exercée ; vous êtes donc obligé par votre justice à lui faire miséricorde.


Vous pourrez dire de même, mon cher [ auditeur ] lecteur, si vous remportez sur vous cette glorieuse victoire, de pardonner de bon cœur à tous ceux qui vous ont offensé.

A suivre ...

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Message  Sandrine Jeu 9 Avr 2009 - 11:03

Car, supposons qu’au sortir de cette prédication, vous alliez trouver vos ennemis et vous réconcilier avec eux pour l’amour de Dieu, et que vous mouriez d’ici à huit ou quinze jours. Après une action si héroïque, que craindrez-vous au jugement de Dieu ? Vos péchés qui sont grands et en grand nombre ? Certes, ils vous doivent donner de la crainte ; mais si le Fils de Dieu prononçait contre vous cette sentence effroyable : Va-t-en, maudit, au feu d’enfer ! N’auriez-vous pas sujet de lui dire : J’en appelle, mon Sauveur, il n’y a point de feu d’enfer pour ceux qui ont allumé en leur cœur le feu de l’amour de Dieu, et éteint le feu des inimitiés. J’appelle de votre parole à votre écriture, de votre sentence à votre promesse, de votre justice à votre vérité et de vous à vous-même ? N’avez-vous pas promis si souvent en l’Evangile que vous nous mesureriez à la même mesure dont nous aurions mesuré les autres ? Que vous nous pardonneriez, si nous pardonnions ? On nous l’a prêché, ou nous l’a assuré de votre part un tel jour ; vous savez qu’après la prédication je me repentis de mes péchés, que j’allai à confesse, que je recherchai l’amitié de tous mes ennemis, que je mis au pied de votre croix toutes les injures qu’ils m’avaient faites ; que je vous ai prié pour eux, que je leur ai voulu du bien et que je leur en ai fait pour l’amour de vous ?
Sans doute que le Sauveur vous tiendrait sa parole, qu’il accomplirait ses promesses, qu’il se sentirait obligé de vous pardonner et vous donner son paradis.

Comme au contraire, quand vous auriez gagné tous les pardons de la Mission, toutes les indulgences du Rosaire, du Scapulaire de Notre-Dame des Anges, et tous les Jubilés que le Pape donne en l’année sainte ; quand le Fils de Dieu même vous aurait donné de sa propre bouche un pardon aussi général, et une indulgence aussi plénière qu’il donna à sainte Madeleine ; si vous mourez avec quelque rancune ou quelque aversion volontaire contre qui que ce soit, vous serez damné, votre grâce au cou :
Dieu vous en garde et vous donne sa paix !

Amen

FIN


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Message  Invité Dim 19 Avr 2009 - 19:41

J’en appelle, mon Sauveur, il n’y a point de feu d’enfer pour ceux qui ont allumé en leur cœur le feu de l’amour de Dieu, et éteint le feu des inimitiés. J’appelle de votre parole à votre écriture, de votre sentence à votre promesse, de votre justice à votre vérité et de vous à vous-même ? N’avez-vous pas promis si souvent en l’Evangile que vous nous mesureriez à la même mesure dont nous aurions mesuré les autres ? Que vous nous pardonneriez, si nous pardonnions ? On nous l’a prêché, ou nous l’a assuré de votre part un tel jour ; vous savez qu’après la prédication je me repentis de mes péchés, que j’allai à confesse, que je recherchai l’amitié de tous mes ennemis, que je mis au pied de votre croix toutes les injures qu’ils m’avaient faites ; que je vous ai prié pour eux, que je leur ai voulu du bien et que je leur en ai fait pour l’amour de vous ?
Sans doute que le Sauveur vous tiendrait sa parole, qu’il accomplirait ses promesses, qu’il se sentirait obligé de vous pardonner et vous donner son paradis.


C'est tellement vrai tous ces mots !
Merci, chère Gratis pro Deo, pour partager ces beaux textes avec nous Very Happy

Mon Seigneur et mon Dieu, faites-moi humble et petit !
Ayez pitié de ma pauvre âme

Invité
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Message  ROBERT. Mer 22 Avr 2009 - 5:27

Gratis pro Deo a écrit:
Dieu vous en garde et vous donne sa paix !

Amen

FIN


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Que Dieu nous donne la grâce de redevenir des petits comme ces petits...
ROBERT.
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